Séance 1 - Attraction

1.1 Les premiers trucages

Le jeu vidéo et le cinéma ont de nombreux points communs, parmi lesquels la façon dont leur histoire est parsemée de bricolages à succès.

Le premier film de fiction date de 1896 et on le doit à une femme, Alice Guy. En 1895, alors secrétaire chez Gaumont, elle assiste à la toute première projection publique des frères Lumière. Le cinématographe est né. Alice Guy est rapidement nommée responsable de la production cinématographique chez Gaumont et tourne la première fiction mondiale : La fée aux choux. Elle invente donc elle aussi le cinéma, en tant qu'outil de projection de l'imaginaire.

Danse Serpentine, Vue Lumière 765, 1897-99L'année suivante, elle filme la danse serpentine de Loïe Fuller. La robe de la danseuse serpente autour d'elle alors qu'elle la soulève de haut en bas, lui donnant l'air d'un papillon en vol. Ce sujet est également choisi par les frères Lumière qui ont l'idée de peindre directement sur le film, pour reproduire en plus du mouvement, le changement coloré de la robe. La véritable invention scientifique qui permet la captation des couleurs naturelles a eu lieu seulement quarante ans plus tard. Avec ce trucage, ce n'est donc pas un nouveau procédé chimique qui est inventé mais une utilisation artistique d'une découverte industrielle. La fiction se situe ici dans les couleurs, car elles sont reproduites approximativement et de mémoire, pour un effet magnifique mais finalement peu réaliste.

À la question “Pourquoi filmez-vous ?” posée par le journal Libération en 1980, le réalisateur Jim Jarmusch répond par une autre question et se demande “Qu’est-ce qu’un film ?”. Il se met à la place de visiteurs d'une autre planète pour décrire ce processus particulier :

Colorisation à la main d'une pellicule, La Magie Méliès, Jacques Mény, 1997

"Si des extra-terrestres dans l'espace observent vraiment nos activités sur la planète, ils doivent trouver que le processus de fabrication des films est des plus ridicules. Premièrement du celluloïd recouvert d'argent est exposé à la lumière pour enregistrer une sorte de « ré-activation de la vie ». Ensuite ce matériau est soumis à différents processus au moyen de machines compliquées, chères et désuètes. Finalement, les spectateurs sont rassemblés dans une grande salle sombre pour regarder ces images lumineuses qui leur sont projetées par une autre machine désuète, que ce qui permet aux dits spectateurs d'assister à une « imitation de la vie »"

La première borne de Space Invaders, Taito, 1978

Dans les années 1980, au Japon, est inventé l’un des premiers jeux de guerre spatial : Space Invaders. Les jeux vidéo n'existent alors que sur des écrans en noir et blanc mais la borne d'arcade sur lequel il est joué permet de lui ajouter une teinte colorée. Du cellophane vert est collé sur la partie haute de l'écran, donnant leur couleur aux vaisseaux extraterrestres venus du ciel. Ce procédé est proche de ceux du virage, du teintage et du pochoir, qui permettent de colorer une pellicule noir et blanc. Les écrans couleurs qui apparaîtront plus tard permettront de programmer toute une palette pour chaque élément du jeu. Les bornes d'arcades, sur lesquelles Space Invaders est pratiqué, sont conçues comme des expériences de parc d'attractions, au même titre que les kinétoscopes, ancêtres du cinéma.

1.2 Loisir : du kinétoscope aux bornes d'arcades

Bertie the Brain, Le comédien Danny Kaye photographié juste après avoir gagné contre la machine, Life, 1950L'autre grand point commun du jeu vidéo et du cinéma dans l'histoire de leur apparition est qu'ils sont passés rapidement du domaine scientifique à celui du loisir.

Le jeu vidéo naît dans les laboratoires scientifiques américains, pour promouvoir les avancées techniques de l'informatique de manière ludique. À son apparition, la borne d'arcade permet de jouer à un jeu vidéo seul ou contre quelqu'un, le plus souvent dans un café ou un bar. Elle côtoie d'autres meubles destinés aux jeux, comme le flipper, le billard ou le baby foot. Progressivement, alors qu'il devient possible de jouer à plusieurs jeux différents sur une même borne, elle est détrônée par les consoles personnelles.

 

Piste pédagogique #informatique : le jeu de l’espace

Objectif : comprendre à quoi ressemblait les premiers titres du jeu vidéo

Matériel : ordinateur connecté à internet, version émulée de Space Invaders sur emulatoronline.com, clavier, vidéoprojecteur

Description : Jouez l’un après l’autre à Space Invaders en tentant de faire le meilleur score possible

 

Piste pédagogique #sansécran : Des ovnis dans la cour !

Objectif : Comprendre les enjeux liés à la création d’une attraction

Matériel : Feuilles de plastique transparent, peinture glycéro (à l’huile) sous forme de feutre (de type posca) ou au pinceau (prévoir alors du white spirit pour le nettoyage)

Description : sur la fenêtre de la classe, on peut voir le ciel, mais si vous y collez une feuille de plastique sur laquelle vous aurez dessiné des OVNI, on croira à une invasion extraterrestre ! Transformez la vue de la fenêtre de la classe en un niveau de jeu de type Space Invaders.

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On remarquera que si Space Invaders paraît ancien, ce n'est pas tellement pour ce qu'on peut y faire, mais pour la qualité de ses graphismes. Cela permettra de faire la transition avec la séance suivante qui parle d'un élément, venu du cinéma, qui a transfiguré le jeu vidéo : l'animation. Comment donner de la vie à un dessin ?

Voir la séance suivante


Autrice : Maud L’Helgoualc’h. Supervision : Amélie Dubois. Ciclic 2020