Upopi #34 : Survivre

Survivre. Un tel programme invite à suivre une ligne de tension extrême qui dévoile autant nos peurs (fondées ou imaginaires) que notre capacité à les surmonter. Le cinéma n'a jamais cessé de jouer et de réinventer ce mouvement essentiel de lutte pour la vie et de lui donner la forme d'un appel puissant à la résistance et à la liberté. Suivons donc pour ce 34ème numéro d'Upopi ce guide de survie cinématographique tout naturellement ouvert à d'autres formes de représentations concernées par ces enjeux.

Si la survie est indéniablement une obsession dans l'air du temps, elle est loin de faire figure de nouvelle venue dans l'imaginaire cinématographique. Enclin depuis ses débuts forains à produire des sensations fortes, le cinéma n'a cessé de jouer, de risquer la peau de ses personnages et de suspendre leur destin à un fil(m). En témoigne en premier lieu les films dits de genre et notamment le cinéma d'horreur, terrain de prédilection du survival ou film de survie. Travaillé de l'intérieur par l'angoisse primitive de dévoration, Alien : le 8ème passager de Ridley Scott porte en lui tout un héritage horrifique qu'il redéploie et réinvente sur un terrain nouveau, celui de la science-fiction.

Mais plus vaste encore sont les horizons cinématographiques de la survie qui nourrissent divers imaginaires (guerriers, apocalyptiques...) et offrent des lectures mythiques, oniriques, fantastiques, métaphysiques du monde. Les multiples pistes survivalistes explorées par la fiction ne tournent pas pour autant le dos à la réalité, elles la réécrivent bien souvent pour mieux révéler ses dérives. Ainsi en est-il de Migration assistée, le court métrage d'animation de Pauline Pinson, qui rejoue sur le mode de la fable animalière la crise climatique. A l'inverse, c'est en épousant la forme très réaliste d'un faux documentaire amateur que Brûleurs de Farid Bentoumi rend compte d'un autre type de survie, d'une actualité tout aussi brûlante, liée aux migrants et aux risques qu'ils prennent pour échapper à une vie sans avenir. Ce film fait partie du programme de courts métrages intitulé « Traverser », qui aborde également différentes formes de survies. Ce programme est proposé cette année par CICLIC dans le cadre du dispositif de Lycéens et apprentis au cinéma. Des lycéens qui s’interrogent également sur la question, à travers une web-série à découvrir également dans ce numéro.

Se dévoile ainsi, à travers ces diverses expressions de la survie, la double faculté du cinéma à témoigner de l'état du monde et à produire des métaphores universelles. Ce partage de la représentation de la survie trouve un écho et un prolongement dans ces formes voisines que sont le film amateur, la série et le jeu vidéo. Soit deux façons radicalement différentes et complémentaires d'appréhender le danger, la catastrophe et d'organiser une mise en scène – improvisée ou au contraire très balisée – quand la menace surgit. L'occasion dans les deux cas d'interroger nos propres réflexes et à travers eux cette inconnue avec laquelle il faut apprendre à composer en cas de survie : nous-mêmes.


La rédaction en chef de ce numéro a été assurée par Amélie Dubois.