Séance 4 : Le montage, d’une image à l’autre

« Ces petits morceaux d’espaces visuels, dont la connexion n’est pas donnée d’avance, par quoi voulez-vous qu’ils soient connectés ? » - Qu’est-ce que l’acte de création ?, Gilles Deleuze, conférence à la Fémis, 17 mars 1987

 

Exemples de storyboards

Le chemin de fer dans l’édition ainsi que le storyboard dans le cinéma d’animation permettent d’organiser visuellement le découpage et la mise en scène d’une histoire.

Toutefois, une différence essentielle existe entre ces deux outils.

Si les images dessinées dans le chemin de fer correspondent aux illustrations présentes dans l’album, il en va autrement pour le cinéma d’animation.

L’image dessinée dans le storyboard est représentative d’un plan constitué d’un nombre plus ou moins grand d’images. Tout l’art du storyboarder est de choisir l’instant T qui décrira au mieux l’intention du plan.

Quelques rappels : Un plan est la succession d’images enregistrées entre la mise en marche et l’arrêt de la caméra. Il a un début, une fin et une durée. Un photogramme est une image isolée d’un film, il correspond désormais à la « capture d’écran ». Un raccord permet de faire la transition entre deux plans successifs. Généralement, le lien se fait par les personnages : leurs actions, leurs regards et leurs paroles.

 

  • Loup noir, Antoine Guillopé, Casterman, 2004

➡ Comment les regards des personnages construisent-ils des liens entre les images ?

L’album d’Antoine Guillopé, Loup noir, devenu un classique de la littérature jeunesse, est réédité à l’occasion de ses 15 ans (1). Une belle occasion de se replonger dans ce récit visuel audacieux. Fan de cinéma, Antoine Guillopé s’inspire des cadrages et des prises de vue cinématographiques pour construire son histoire.

Quelques rappels supplémentaires : Les différentes prises de vue : Prise de vue frontale : la caméra est placée à la hauteur du sujet filmé, Prise de vue en plongée : la caméra est placée en hauteur par rapport au sujet filmé, Prise de vue en contre-plongée : la caméra est placée en dessous du sujet filmé Prise de vue objective : la caméra fixe l’action d’un point de vue extérieur, Prise de vue subjective : la caméra adopte le point de vue d’un personnage et montre ce qu’il voit.

Décrire ces deux images à fond perdu qui coexistent sur la double page ci-dessous. Faire le lien avec les yeux présents sur la couverture de l’album. L’image de gauche représente-t-elle la vision du loup mis en scène dans l’image de droite

Images tirées de l'album Loup noir
L’image suivante confirme-t-elle ou infirme-t-elle nos hypothèses ? A quelle distance le loup se trouve-t-il de l’enfant ?

Image tirée de l'album Loup noir

Associer l’image du personnage en train de regarder avec la vue subjective correspondante. Que remarquez-vous ? Quel espace y a-t-il entre les regardeurs et l’enfant ?

Image tirée de l'album Loup noir

Image tirée de l'album Loup noir

Comment Antoine Guillopé crée-t-il un suspense insoutenable ?

Image tirée de l'album Loup noir

Image tirée de l'album Loup noir

Même si Antoine Guillopé continue de jouer avec les regards de ses personnages jusqu’à la fin de son livre, je m’en voudrais de divulguer ici la suite de l’histoire. Rendez-vous dans toute bonne médiathèque ou librairie.

 

  • Un peu perdu, Chris Haughton, Éditions Thierry Magnier, 2010

  • Un peu perdu, Hélène Ducrocq, 2017

➡ Comparer comment les déplacements sont représentés dans les deux médiums.

Image tirée de l'album Un peu perdu

Que nous propose la cinéaste pour le deuxième trajet de l’écureuil et du bébé chouette ? (2)

La séquence commence par deux plans fixes.

2 photogrammes tirés du film Un peu perdu

Le premier plan présente un cadrage serré sur la tête de l’ours. L’écureuil est agrippé à son cou.

Le cadrage choisi met en valeur le regard des deux protagonistes. L’écureuil s’adresse au bébé chouette qui est en hors-champ.

Le raccord entre les deux plans se fait par le regard échangé entre l’ours et le bébé chouette. Ce procédé de montage est appelé champ-contrechamp.

Le champ-contrechamp est le procédé de montage qui consiste à faire alterner un champ donné et un champ spatialement opposé. Dans l’extrait, le champ est associé à ce que voit le bébé chouette et le contrechamp à ce que voit l’ours.

A la fin du deuxième plan fixe, le bébé chouette emboîte le pas à l’écureuil. Il sort du cadre par le bord gauche. Le plan suivant est un plan en mouvement, nous avançons vers le fond de l’image. Notre vision de spectateur est celle du bébé chouette.

Les raccords de mouvements, de gestes Un personnage amorce un mouvement à la fin d’un plan et le poursuit dans le plan suivant.

 

2 photogrammes tirés du film Un peu perdu
A la fin du plan lorsque le bébé chouette a rejoint l’écureuil et le lapin, la caméra redevient fixe. Nous retrouvons la situation décrite dans la page après « la tourne » (3).

Voir la séance suivante


1) Cette réédition permet d’appliquer à l’album la technique de la découpe au laser.
2) Un premier trajet est étudié dans la séance précédente.
3) « La tourne » correspond à l’action de tourner la page.