La mémoire, au cinéma, c'est aussi celle du cinéma lui-même. Avant de devenir matière à référence pour de très nombreux réalisateurs, l'œuvre d'Alfred Hitchcock a été influencée par les films de cinéastes antérieurs, ou contemporains : ceux du cinéma allemand des années 1920 (en particulier Friedrich Wilhelm Murnau et Fritz Lang), de pionniers du cinéma hollywoodien (David W. Griffith, Cecil B. DeMille et Ernst Lubitsch) et soviétique (Sergueï Mikhaïlovitch Eisenstein), et de deux des principaux auteurs du cinéma fantastique américain des années 1930 : Tod Browning et James Whale. Par exemple, un film tel que Cinquième colonne contient des références manifestes à La Fiancée de Frankenstein (The Bride of Frankenstein, 1935), de James Whale, et à La Monstrueuse Parade (Freaks, 1932), de Tod Browning.
Souvenir de Freaks dans Cinquième Colonne (Saboteur, 1942).
Dans le même temps, Cinquième Colonne est une relecture d'un film antérieur de Hitchcock, Les 39 Marches. Sans se copier platement, Hitchcock reviendra ainsi régulièrement sur ses propres films : La Mort aux trousses constitue une seconde relecture des 39 Marches, et le récit psychanalytique de Pas de printemps pour Marnie renvoie à celui de La Maison du Docteur Edwardes. Enfin, Hitchcock est un des rares cinéastes à avoir réalisé un remake d'un de ses propres films : ce sont les deux versions, l'une anglaise en 1934 et l'autre américaine en 1956, de L'homme qui en savait trop.
Parmi l'innombrable descendance de l'œuvre hitchcockienne, une des réalisations les plus singulières est sans doute La Jetée, court métrage réalisé en 1962 par Chris Marker, film par excellence des affres et des circonvolutions de la mémoire, qui cite presque ouvertement Sueurs froides. La référence à Sueurs froides deviendra explicite dans un film que Marker réalisera vingt ans plus tard : Sans soleil.
NOTA : les références des extraits de films cités sont mentionnées à la fin des montages vidéo qui en sont composés.
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Auteur : Jean-François Buiré. Ciclic, 2015.
